Dépassées les RP ? C’est à voir !

par | 19 Fév 2018


Dépassées les #RP ?

 Un article publié dans Linkedin le 9 février 2018

Soixante-dix pour cent des nouvelles dans les médias sont générées par les #RP ou Relations Publics selon le terme consacré par le Syntec-RP, il y a déjà 8 ans. Le reste c’est l’actualité qui le dicte !

Les #RP sont incontournables et elles sont chamboulées !

Les #RP sont passionnantes et tout autant frustrantes ! Echanger et dialoguer avec les journalistes, leur apporter un angle auquel ils n’auraient pas songé, supporter & comprendre leur agacement lors des relances, composer avec leurs contraintes, multipliées à cause du temps qui leur fait de plus en plus défaut, des manques de moyens des équipes, de l’accélération des rythmes de travail. Le conseiller passe le plus clair de son temps à se questionner sur la pertinence de sa stratégie, la clarté de ses messages, la bonne adéquation avec l’actualité, l’efficacité des moyens employés pour transmettre avec rigueur et inventivité le message des organisations qui lui ont fait confiance.

Travailler à modifier la perception que peuvent avoir les consommateurs, les donateurs, les parties prenantes sur une problématique, aider à la compréhension d’un sujet, même le plus complexe, voilà ce qui fait le sel de la profession de #RP.

Pourtant, jour après jour, si le nombre de titres ne diminuent pas, il s’en crée beaucoup encore, il devient difficile de continuer à faire des #RP sans prendre en compte, la révolution qui est toujours en train de se dérouler dans les médias. Le conseiller RP est en train de changer de nature même s’il fait également (et paradoxalement) un retour aux sources.

Aux confins du visible et de l’invisible, encore mal connu, parfois mal considéré, on lui prête une dimension magique qu’il n’a pas (cela se saurait s’il suffisait de claquer les doigts pour obtenir un article !), il a profondément évolué de même que ses pratiques. A l’ère du digital, il lui faut encore s’adapter, poursuivre cette longue mue qui dure depuis maintenant près de 10 ans. Elle se calque sur la difficile et laborieuse transformation du paysage médiatique, qui, sous la pression du numérique, a profondément impacté notre société.

Quelques étapes de la transformation des #RP

Lors de la rédaction du premier livre blanc, au sein du Synap[1] alors que nous organisions les Virages #RP, nous prenions la mesure des bouleversements.

Un deuxième livre blanc en 2017 intitulé « la révolution continue », a non seulement confirmé les premiers constats mais a aussi clairement démontré l’impact très important et durable du web sur nos métiers. Il nous fallait changer de braquet et devenir des professionnels de la relation digitale…. Dans un monde où les frontières étaient en passe d’imploser.

  1. Les #RP sont devenues stratégiques, ce fait n’est pas sans augmenter la défiance des journalistes à notre égard et tendre quelque peu nos rapports déjà un peu compliqués.
  2. Elles ne se limitent plus aux retombées. Le simple fait d’obtenir des retombées ne suffit plus : il faut désormais partager, faire vivre les articles et les dossiers parus dans les médias. Une sorte de SAI(service après information) qui assure la longévité des informations. Elles ne sont plus désormais des denrées périssables mais doivent être encore plus valorisées par le Conseiller #RP sur les réseaux sociaux, les blogs et auprès des influenceurs.
  3. Elles se sont technicisées: nous devons rédiger nos communiqués en tenant compte des exigences du SEO (référencement sur le web par les moteurs de recherche) et nous former à des techniques « barbares » mais fort utiles pour maîtriser le back-office des blogs et sites web de nos organisations et marques. L’usage du podcast est devenu la norme.
  4. Elles sont définitivement devenues digitales: Convaincre nos organisations que la presse web aujourd’hui est aussi importante que la presse papier, c’est déjà de l’histoire ancienne. Il nous appartient de les familiariser avec d’autres types de médias et qu’une information dans un « pure player » est une bonne (voire une meilleure) opportunité de prise de parole. Ce qui n’est pas toujours chose aisée.
  5. Elles se sont complexifiées: Si nous avons réussi à les convaincre que nous sommes en mesure de dialoguer avec les blogueurs et les influenceurs, nous devons nous inventer de nouvelles règles déontologiques et vite ! A quel prix faut-il payer un blogueur ? Est-il d’ailleurs pertinent de le faire ? Comment innover dans nos supports de communication-presse et quel langage nous faut-il adopter ? Faut-il les inviter avec les journalistes et mélanger les publics ? Faire une communication différenciée ? Au royaume du « Brand content », comment concocter une information réellement utilisable et à forte valeur ajoutée ?
  6. Elles ont souvent succombé aux sirènes du marketing: C’est pourquoi ne pas céder à la tentation de se transformer en marketeur est devenue une prouesse. Les outils aujourd’hui sont redoutablement efficients et nous feraient oublier de privilégier le sur-mesure. Pourtant les listes de presse se cisèlent comme des bijoux et rester les « rois et reines » de la relation journaliste a un prix : celui de la patience, de la justesse, de la personnalisation, bref tout ceci requiert du temps ! Une denrée rare mais pourtant nécessaire pour insuffler de la confiance dans notre relation avec les médias.
  7. Elles sont désormais mesurables: Les organisations et les marques réclament des indicateurs de performances (les fameux KPI) : la culture de l’évaluation est désormais acquise : la mesure des #RP devient un passage obligé pour tout professionnel. Nous n’échappons plus au désormais fameux « ROI » : retour sur investissement.  Lanalyse quantitatives retombées médias ne sont plus le seul moyen de nous évaluerDe très bons outils existent, tel le référentiel de la mesure, mais il nous faut souvent argumenter pour obtenir les items et critères de base pour mesurer de manière optimale.  Lire ici 
  8. Elles sont protéiformes: les frontières s’amenuisent entre les différents domaines : RP, Community Management ou Social Media Management. De plus, nous devenons également des médias, des influenceurs via nos blogs, nos tweets ou nos posts : nous rentrons souvent en contact directement avec les consommateurs et redevenons des conseillers en relations publics… ce que nous étions à l’origine !

Un requiem ou une Ré-volution ?

Aujourd’hui, si le terme de « dépassé » a été évoqué, c’est parce que les réseaux sociaux semblent avoir simplifié dramatiquement l’équation : les marques ou les organisations rencontrent directement leurs publics. Point final ! Les organisations créent leurs propres médias sous prétexte de défiance vis à vis de la presse ou d’efficience. Si les journalistes sont en passe d’être remisés aux oubliettes, cela signifie-t-il que nous sommes arrivés au terme de la relation compliquée et parfois conflictuelle avec eux ? Quel avenir dans une société où la relation directe organisations/grand public à tendance à nous exclure ? Cette crise de l’intermédiation signe-t-elle notre mort et celle de l’information ? Est-il temps d’entamer une oraison funèbre ?

C’est aller un peu vite en besogne.

D’abord parce qu’au moment où l’on parle de légiférer sur les « Fake News », il apparaît d’autant plus nécessaire de mettre en place des garde-fous. C’est là que notre rôle de pédagogue auprès des organisations prend alors tout son sens !

Nous devenons paradoxalement des auxiliaires de l’information avant que d’être des communicants ou des marketeurs. C’est notre ADN ! Le rôle de fournisseurs de contenus qui aient du sens nous est dévolu et ce, depuis l’origine du métier.

Nous sommes les premiers censeurs des informations de nos organisations même si nous ne sommes plus la seule source d’information du journaliste.

Dans un monde connecté où règne le sensationnel et l’instantanéité, nous devons rester rigoureux et sobres. Plus que jamais, nous devons prendre le pouls de l’opinion, bien identifier les publics et les parties prenantes et/ou intégrantes et maîtriser les vecteurs d’information. Mettre en lumière une information, rechercher des angles, soutenir une argumentation, expliquer une démarche : un travail quotidien au service de l’information qui ne peut se faire sans une nécessaire pédagogie, auprès de nos organisations comme auprès de nos autres publics. La confiance doit rester le maître-mot de la relation que nous entretenons avec les médias (et tous nos autres publics) même si elle est parfois chahutée de part et d’autre.

Comme toujours, cette révolution nous demande de regarder l’avenir avec confiance et optimisme.

Les défis qui attendent les #RP

  • Les #RP deviennent peu à peu des influenceurs et interagissent également à l’instar des bureaux de tendance. Elles sortent de l’invisibilité et de leur apparente neutralité sans aller jusqu’à la subjectivité qui leur est interdite de facto. Comment concilier cet état de fait avec la tendance qu’ont naturellement les #RP à devenir de porte-paroles officieux de l’organisation et ses premiers ambassadeurs ? Va-t-il se créer un réflexe d’autocensure sur les réseaux sociaux comme celui qui se met en place chez les DIRCOM ? Lire à ce propos Frédéric Fougerat
  • Comment mieux prendre en compte les ambassadeurs naturels des organisations que sont les bénévoles, les salariés ou les collaborateurs de l’entreprise et les sensibiliser à la prise de parole ?
  • Comment intégrer toutes les parties prenantes et notamment les influenceurs ? Ces derniers changent et les grandes vedettes d’hier ne sont pas celles qui seront suivies par l’opinion publique demain. Et nous ne pouvons plus ignorer ni les uns, ni les autres….Lire ici 
  • Le RGPD 2018 ou règlement européen sur les données personnelles pourrait alourdir quelque peu nos responsabilités puisque nous élaborons des fichiers qui comportent parfois des données personnelles sur nos publics : comment les constituons-nous ? Comment assurons-nous leur sécurité ? Ces publics ont-ils la possibilité de rectifier les informations ? A-t-on un intérêt légitime à contacter ces personnes ? Ont-elles donné leur accord ? Pour tout savoir lire le thread du compte twitter du SYNAP : là 
  • S’adapter aux nouveaux médias digitaux et susciter leur intérêt : en une dizaine de tweets ou de posts, ces journaux matinaux le plus généralement quotidiens ou hebdomadaire ont réussi à accrocher des dizaines de milliers de lecteurs chaque jour. Cela requiert de concevoir des supports de communication adaptés, de concevoir de nouvelles applications, toujours plus intuitives et adaptées à la fluidité des échanges. Voir ici à propos du nouveau média Flashtweet
  • Un autre grand défi ? Résoudre la crise de la médiation tout en maintenant la confiance de l’ensemble des publics. Le journalisme citoyen a de beaux jours devant lui, toute personne a désormais vocation à devenir un vecteur d’informations et de contenus : trouver notre place aura une importance plus que capitale. Lire ici sur le dernier sommet sur ce thème :  les hommes des médias face au journalisme citoyen
  • Le prospective bien sûr : comment faire en sorte que les #RP épousent étroitement les transformations sociétales et organisationnelles. Certains professionnels l’ont bien compris puisqu’un premier laboratoire de réflexion et de prospective vient de se lancer, il y a peu. Lire ici
  • Il me semble également que la notion de réseau et de partage va encore se développer et que paradoxalement, l’énorme flux d’informations va nous conduire à pratiquer davantage encore la différenciation et la personnalisation. Nous le voyons déjà à l’agence où nous concoctons littéralement des contenus à usage unique ou presque.
  • La communication de crise ne sera plus jamais une option mais elle va au contraire devenir une obligation en terme d’anticipation et de cartographie des risques puisque le lynchage numérique peut devenir la norme : ce qui était réservé à des agences triées sur le volet est amené à se généraliser ; repérer et traiter les signaux faibles : lire ici.

Tour à tour influenceur, parfois ambassadeur, Social Media Manager, stratège, Community Manager, le conseiller en relations publics a finalement toute une palette d’outils et de disciplines à sa disposition pour affronter l’avenir. Il lui reste à convaincre les organisations de le suivre et d’accepter de jouer les précurseurs.

Avouons-le, s’il devient de plus en plus compliqué de faire notre métier, il reste l’un des plus séduisants au monde ! Que ce défi est passionnant !

 

Pour compléter cet article, lire l’interview que j’ai donnée à la plateforme Exxe : ici

 

  1. Pour nos amis québécois : milles excuses pour le nombre ahurissant d’anglicismes : je ferais une version expurgée très vite !

 

Marie-Pierre Medouga

 

 

[1] J’étais alors Vice-Présidente du SYNAP

 

 

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